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FRESSENNEVILLE - 6 avril 1906

                                  

 

 

LES EVENEMENTS DE FRESSENNEVILLE EN 1906

D’APRES LE JOURNAL « L’ABBEVILLOIS »

 

 

NUMERO DU 6 AVRIL 1906

 

 

Nouvelle Grève dans le Vimeu à l’usine de M. RIQUIER. Agitation Révolutionnaires. Manifestations tumultueuses. Maisons saccagées et incendiées.

 

Des troubles d’une exceptionnelle gravité se sont produits mardi à FRESSENNEVILLE à la suite d’une grève qui a éclaté à l’improviste dans l’usine de MM. Julien et Edouard RIQUIER fabricants de serrures.

Si le motif exact de cette grève est encore ignoré, on en connaît du moins le prétexte.

Et ce prétexte, lin de justifier les actes de sauvagerie qui ont été commis, ne permet pas même d’en excuser les auteurs.

 

Les Préliminaires

 

Samedi dernier, à la paie de quinzaine, MM. RIQUIER congédiaient deux ouvriers, dont un contremaître, dont le travail laissait à désirer depuis longtemps et qui n’avait jamais tenu compte des observations à lui adressées et un ouvrier dont le travail très simple, allait être confié à un débutant.

 

Ce renvoi ne provoqua alors aucune protestation. Mais lundi MM. RIQUIER étaient avertis qu’on préparait quelque chose contre eux.

En effet, mardi, vers midi, quelqu’un e présentait à l’usine demandant à parler au directeur.

M. Julien RIQUIER se trouvait à AMIENS, où il était retenu à la Cour d’Assises comme membre du jury.

Ce fut M. Edouard RIQUIER, qui reçut seul le visiteur.

Celui-ci se présenta comme délégué du syndicat ouvrier ; il déclara qu’il venait au sujet de la mise à pied des ouvriers qui faisaient leur quinzaine.

M. Ed. RIQUIER répondit qu’il regrettait de ne pouvoir engager des pourparlers dans ces conditions, son associé et lui étant en bons termes avec leurs ouvriers et ayant coutume de régler directement avec eux toutes les difficultés qui pouvaient se présenter.

Après cette explication, le délégué se retira sans formuler d’observation.

 

Après son départ, M. RIQUIER fit appeler l’ouvrier qui faisait ses quinze jours et le pria de ne plus revenir à l’atelier. En même temps, il lui remettait le prix de sa quinzaine. L’ouvrier refusa, non sans proférer quelques paroles injurieuses.

A une heure, les ouvriers sortaient comme de coutume pour aller prendre leur repas. Cette sortie s’effectua sans le moindre incident.

Cependant, la situation n’allait pas tarder à s’envenimer.

 

La Grève

 

A 2 heures ½ , les ouvriers, au lieu de revenir dans les ateliers , se groupaient devant le siège de leur syndicat dont ils avaient sans doute reçu un mot d’ordre.

Quelques minutes après, un certain nombre d’entre eux se présentaient à l’usine ayant à leur tête l’ouvrier renvoyé.

M. RIQUIER sortit alors dans la cour et demandé à celui-ci pourquoi il persistait à se présenter encore après la défense qui lui avait été faite de rentrer à l’usine.

Sans vouloir rien entendre, l’ouvrier mécontent prétendit s’introduire de force dans les ateliers.

 

En présence de cette attitude M. Ed. RIQUIER s’adressa aux autres ouvriers, essayant de leur faire comprendre qu’ils s’engageaient dans une voie regrettable. En quelques paroles, il les exhorta au calme, leur rappelant les relations cordiales qui avaient toujours existé entre eux et leurs patrons, tout ce qui avait été fait depuis vingt ans pour augmenter leur bien-être.

 

Les ouvriers présents abandonnèrent alors leur camarade congédié et rentrèrent dans les ateliers dans le plus grand calme.

Il était à ce moment 2h ¾ et tout paraissait apaisé.

 

« Vive la grève ! »

 

Mais à 3 heures, M. RIQUIER allant faire une tournée dans les ateliers du premier étage, rencontra à la porte quelques ouvriers qui sortaient.

Comme ils se montraient hésitants, M. RIQUIER leur expliqua qu’ils étaient libres d’agir à leur guise, mais que la grève pouvait avoir des conséquences fâcheuses.

Une fois de plus, les hésitants parurent ramenés à la raison. 

Ils se disposaient à reprendre le travail lorsqu’un certain nombre d’ouvrières sortirent des ateliers du rez-de-chaussée. En passant au pied de l’escalier, elles crièrent : Vive la grève !

 

Cet appel fut entendu comme un signal et, au lieu de retourner à leurs occupations, les ouvriers indécis, descendirent dans la cour. Ils s’y trouvèrent bientôt amassés en grand nombre et

 

Les premiers troubles

Commencèrent sans autre prélude.

 

Les grévistes qui avaient apporté des pierres dans leurs poches s’en servirent pour cribler les façades de l’usine des magasins et des bureaux.

Certains même, se dirigèrent vers la machine à vapeur sur laquelle ils lancèrent également des pierres.

Sur les 400 ouvriers employés à l’usine, la moitié environ avait à ce moment abandonné le travail.

M. RIQUIER dut faire aussitôt arrêter le moteur et il parcourut les ateliers avertissant qu’il se voyait dans l’obligation de suspendre le travail pour éviter de plus grands désastres.

L’usine fut alors évacuée.

Une partie des grévistes se forma en cortège arborant un drapeau dont on ne laissait flotter que le rouge.

Pendant qu’ils parcouraient tumultueusement le village, M. Julien RIQUIER arrivait d’AMIENS.

Comprenant la gravité de la situation, il se disposé à partir immédiatement pour ABBEVILLE afin de demander la protection de la troupe.

 

Sac et pillage

 

A ce moment, on apprenait que les manifestants, massés devant la maison de M.Ed.RIQUIERsituée route de FEUQUIERES, non contents de cribler la façade de pierres, arrachaient les volets et brisaient les fenêtres.

Il n’y avait plus de doute sur la gravité de la situation.

MM RIQUIER, en présence de l’attitude des forcenés, partirent en automobile et rentrèrent à ABBEVILLE où ils sont installés pour l’hiver avec leur famille.

 

Le désordre augmente

 

Pendant ce temps, les grévistes poussés par les meneurs et excités par les voyous perpétuellement sans travail qu’on voit opérer dans le VIMEU à toutes les grèves, faisaient la navette entre les maisons de MM. Ed. et J. RIQUIER 

 

Après avoir abîmé la première, ils s’attaquèrent à la seconde, construite en face de l’usine, mais qui, plus éloignée de la rue, se trouvait mieux protégée.

 

N’ayant pas pu briser les grilles, les manifestants retournèrent à la maison de M. Ed. RIQUIER. En passant devant les habitations de plusieurs contre-maîtres, ils les criblèrent de pierres et leur firent subir d’importants dégâts.

 

Enfin, armés de pinces et de plus en plus audacieux, ils soulevèrent et renversèrent la grille de la maison de M. Ed. RIQUIER et pénétrèrent à l’intérieur. Ce fut alors une véritable dévastation. Tout le mobilier fut jeté par les fenêtres et l’immeuble saccagé de la cave au grenier.

 

Chez M. DELARUE, directeur et adjoint au maire, ils brisèrent toutes les vitres de la façade.

Un des grévistes descella une gargouille se trouvant à gauche de la grille et s’en servit pour briser celle-ci. Dès qu’ils purent pénétrer à l’intérieur, ils saccagèrent l’immeuble. M. DELARUE fils, effrayé de ces scènes, tira quelques coups de révolver en l’air.

La rage de destruction ne faisant que s’accentuer, la bande retournaà la maison de M. Julien RIQUIER qui subit le même sort. Tout fut dévasté de fond en comble.

Après quoi, une légère panique s’étant produite, les grévistes croyant sans doute à l’arrivée des gendarmes, on retourna à l’autre maison.

 

Les démolisseurs

 

Il était alors un peu plus de six heures du soir. En passant devant le chantier de démolition de la vieille église, que les ouvriers venaient de quitter, les manifestants s’emparèrent des outils, pics, pioches, qui se trouvaient là et, ainsi armés, se mirent en devoir de démolir l’habitation de leur patron.

Les planchers de la maison de M. Ed. RIQUIER furent ainsi démontés et toutes les boiseries arrachées. Mais la besogne n’allait pas encore assez vite.

A 8 h ¼, on apprenait qu’un détachement d’infanterie allait descendre à la gare de FEUQUIERES du train qui arrive à 8h ½.

Il n’y avait pas de temps à perdre !

 

L’incendie

 

Pour aller plus vite, les « travailleurs » empilèrent tous les débris, meubles, planches etc… les arrosèrent de pétrole et y mirent le feu.

En quelques minutes, la maison flambait. Il n’en reste plus rien aujourd’hui. Tout a été réduit en cendres. A l’heure actuelle, on peur évaluer le total des dégâts à près de deux cent mille francs, et l’on craint que de nouveaux méfaits ne soient commis.

 

Le chômage

 

L’usine de M. RIQUIER, qui occupait, comme nous l’avons dit, quatre cents ouvriers, fournissait en outre du travail à domicile à un millier de personnes. C’est le chômage complet pour tous.

 

La maison des RIQUIER après l'incendie.

 

                             1906 CHATEAU BRULE.gif

  

 

Les mesures d’ordre

 

La garnison d’ABBEVILLE, considérablement réduite en raison des détachements envoyés aux grèves du Pas-de-Calais,n’a pu fournir que 60 hommes d’infanterie mardi soir.

Hier matin, à quatre heures, unpeloton du 3ème chasseurs s’est rendu à FRESSENNEVILLE.

 

La journée de mercredi

 

FRESSENNEVILLE, 4 avril , soir

 

Du mardi soir jusqu’à la fin de la journée de mercredi, aucun trouble ne s’est produit. Les manifestants se sont bornés à parcourir les rues en acclamant la grève et en chantant des couplets révolutionnaires.

De tous côtés, les gendarmes arrivant pour renforcer les brigades de VALINES et de GAMACHES.

D’autres détachements de cavalerie arrivent également.

Un grand déploiement de forces parait nécessaire car on redoute une extension du mouvement gréviste. On dit que le Comité du Syndicat du VIMEU serait décidé à faire voter la grève générale des ouvriers serruriers.

L’usine et la maison de M. Julien RIQUIER sont gardées par la troupe.

Les autorités, le sous-préfet, M. MAGNIEZ capitaine de gendarmerie, le Procureur de la République, sont sur les lieux.

 

Le Syndicat

 

Le syndicat ouvrier créé à FRESSENNEVILLE existe depuis peu. Il est l’oeuvre d’un petit groupe qui contraint les autres ouvriers à en faire partie.

C’est bien ce syndicat qui a préparé la grève ou plutôt le mouvement insurrectionnel.

Mais la grève n’a pas éclaté, comme on l’a prétendu, parce que MM. RIQUIER auraient déclaré à leurs ouvriers qu’ils ne voulaient pas reconnaître le syndicat.

 

Jamais, à aucun moment, dans aucune circonstance, nous sommes autorisés à l’affirmer de la manière la plus catégorique, il n’a été question du syndicat entre MM. RIQUIER et leurs ouvriers.

 

Les faits se sont passés tels que nous les avons relatés plus haut. Le contre-maître congédié n’a jamais dit à MM. RIQUIER qu’il s’adresserait au syndicat et MM. RIQUIER ne lui en ont point parlé, non plus qu’aux autres ouvriers.

C’est seulement mardi matin, quand le délégué syndical s’est présenté, qu’il a été question du fameux syndicat. Le patron ne voulut pas enentendre parler parce qu’il avait affaire à un inconnu complètement étranger au personnel de la fabrique. Il n’en fut plus question ensuite.

 

 

Le Rôle de la Justice

 

Ainsi que nous le disons plus haut, le parquet s’est transporté hier à FRESSENNEVILLE, procureur général en tête.

Quelle besogne mystérieuse ont accompli les magistrats ?

Tout le monde se le demande, car, à part quelques questions posées de ci et de là, il n’y a eu aucun interrogatoire, aucune arrestation.

Cependant, il y a des coupables !

Des maisons ont été pillées, saccagées, incendiées. Ce sont des crimes punis par le code.

Pourquoi la Justice, si prompte à mettre ne prison les manifestants catholiques, n’agit-elle pas aujourd’hui ?

Les émeutiers ont travaillé au grand jour. Il ne doit pas être difficile de découvrir les malfaiteurs.

Si l’on ne sévit pas, si l’on hésite à châtier les coupables, c’est le régime de la terreur qui va s’installer dans tous les centres industriels.

 

Lors de la grève de l’usine DEBEAURAIN, plusieurs maisons furent saccagées. Trois individus arrêtés se virent relâchés au bout de quelques jours. (voir notre article BETHENCOURT en 1906)

Depuis, on n’a jamais entendu dire que les coupables aient été découverts et poursuivis.

L’impunité encourage les malfaiteurs dont l’audace grandit sans cesse.

 

Depuis quelques années, il existe dans le VIMEU un noyau d’anarchistes qui fait marcher les ouvriers, les excite, les porte aux pires violences.

Incendiaires aujourd’hui, ces meneurs seront demain meurtriers.

Attendra-t-on que le sang ait coulé pour se décider à agir ?

 

Dès lundi, M. Edouard RIQUIER avertit qu’un mouvement gréviste se préparait, avait avisé la sous-préfecture. Mardi matin, M. Julien RIQUIER, comme industriel et comme maire de FRESSENNEVILLE, faisait une nouvelle démarche.

Mais M. le sous-Préfet se garda bien d’organiser un service d’ordre :il a d’autres soucis en tête.

Il en est résulté les évènements que l’on connaît. !

 

M. BIGNON, député, s’est rendu hier soir au ministère de l’Intérieur où il s’est entretenu avec M. SARRAULT des incidents qui se sont produits à FRESSENNEVILLE et des manifestations qui sont encore paraît-il à redouter.

M. SARRAULT a assuré M. BIGNON que toutes les mesures avaient été prises afin que l’ordre ne soit plus troublé.

 

 

Dernière Heure

 

 

FRESSENNEVILLE 8 avril, midi

 

La nuit a été calme ; ce matin les chants révolutionnaires ont recommencé. Les esprits sont toujours très excités. Les grévistes, en bande bruyante, parcourent les pays voisins. Un escadron de hussards vient d’arriver.

D’autres troupes sont attendues.

 

 

 

 


Date de création : 14/06/2007 @ 10:16
Dernière modification : 01/11/2017 @ 19:10
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