* *
* *
genealogie

CONSCRITS SERRURIERS

DIVERS DOCUMENTS

RECENSEMENTS

Histoire locale

Géographie 01

Histoire locale 01

Histoire locale 02

Histoire locale 03

Histoire locale 04

Histoire locale 05

Histoire locale 06

Histoire locale 07

Histoire locale 08

Histoire locale 09

Histoire locale 10

Histoire locale 11

Histoire locale 12

Recherche



Webmaster - Infos
Visites

   visiteurs

   visiteurs en ligne

Préférences

Se reconnecter
---

Votre nom (ou pseudo) :

Votre code secret


 Nombre de membres 10 membres


Connectés :

( personne )
FRESSENNEVILLE 10 et 12 avril 1906

LES EVENEMENTS DE FRESSENNEVILLE EN 1906

D’APRES LE JOURNAL « L’ABBEVILLOIS »

 

 

NUMERO DU 10 AVRIL 1906

 

 

FRESSENNEVILLE, 10 avril

 

La situation ne s’est pas modifiée. Aujourd’hui comme hier tout est calme. Le pays reste d’ailleurs occupé par les troupes qui demeureront encore ici, croit-on, plusieurs semaines.

 

Les grévistes vont quêter dans les localités voisines et ils organisent des soupes populaires sur les indications du citoyen MOREL.

Les magistrats n’ont encore procédé à aucune arrestation et l’enquête ne paraît pas avancer beaucoup.

 

 

 

 

Déclarations de MM. RIQUIER

 

MM . Julien et Edouard RIQUIER ont quitté ABBEVILLE dimanche matin. On ignore combien durera leur absence.

Avant leur départ, l’un de nos confrères de la Liberté a pu les revoir et avoir avec MM. RIQUIERun nouvel entretien que voici :

 

« Comptez-vous ouvrir de nouveau vos ateliers ? » leur ai-je demandé.

 

« Nous ne savons pas encore d’une façon définitive ce que nous ferons, m’ont-ils répondu. Actuellement, nous sommes encore trop émus par le désastre qui nous atteint pour pouvoir prendre une décision. Fermerons-nous notre usine, la rouvrirons-nous un jouret alors en plaçant à sa tête un directeur, car, pour nous, il ne saurait être question de retourner à FRESSENNEVILLE ? Nous l’ignorons. En ce moment, après un coup pareil, nous avons besoin de nous reposer, et c’est pourquoi nous avons résolu de quitter momentanément ABBEVILLE.

 

Si nous rouvrions notre usine, pourrions-nous reprendre notre ancien personnel ? Pourrions-nous accueillir à bras ouverts les hommes qui ont envahi nos maisons, qui ont commis chez nous les actes criminels que vous savez, traiter en amis les hommes qui nous ont traités en ennemis, qui, non contents de s’en prendre à notre propriété, ont voulu s’attaquer à nos personnes, qui nous ont cherchés pour nous faire un mauvais parti, qui nous ont poursuivis en poussant contre nous des cris de mort et en nous jetant des pierres ?

Cela – cette attitude de nos ouvriers à notre égard – nous a attristé bien plus encore que les pertes matérielles qu’ils nous ont fait subir.

Certes, tous ces ouvriers n’ont pas, de plein gré participé au pillage et à l’incendie, et nous ne les rendons pas tous responsables. Nous savons que beaucoup d’entre eux n’ont suivi les meneurs, que parce que ceux-ci les ont terrorisés par leurs menaces. Mais, comment expliquer que si peu nous soient restés fidèles, alors que tant d’entre eux avaient toujours été considérés et traités par nous comme des amis ?

 

Cette désaffection et cette défection de nos ouvriers, c’est l’oeuvre d’un petit groupe d’anarchistes qui, depuis une vingtaine d’années, se sont installés à FRESSENNEVILLE, et qui, quoique ne faisant même pas partie du personnel des usines, mènent tout le mouvement. Ils sont bien connus : leurs dossiers sont au parquet d’ABBEVILLE.

On a perquisitionné chez plusieurs d’entre eux lors de l’attentat de VAILLANT, lors de l’assassinat du président CARNOT et, tout récemment encore, lors de la campagne antimilitariste.

 

Ce sont des anarchistes qui, par leurs longues excitations, ont fini par changer complètement l’état d’esprit d’ouvriers que nous aimions et qui nous aimaient, qui, certainement, n’avaient pas à se plaindre de nous puisque, quand ils se sont mis en grève, ils ne nous réclamaient pas la moindre augmentation de salaire et que, lorsque les ouvriers d’une usine du VIMEU déclarent la grève pour une question de salaire, ils demandent à « être payés comme chez les RIQUIER « 

 

Quelle autorité morale aurions-nous si, après ce qui s’est passé, nous rouvririons notre usine et retournions à FRESSENNEVILLE., Quel respect pourrions-nous attendre d’eux ? Quelle confiance pourrions nous avoir en eux ? »

 

M. Julien RIQUIER a clos cet entretien par ces mots :

 

« Si nous devons rouvrir notre usine, nous ne pourrons, en tout cas le faire que lorsque nous apprendrons que les auteurs responsables du pillage et de l’incendie sont sous les verrous »

 

 

 

Le geste du citoyen MOREL

 

D’un article sur le 1er mai révolutionnaire de M. Georges MONTORGUEIL, article paru dans l’Eclair d’hier lundi, nous détachons les passages suivants qui ont trait aux incidents de FRESSENNEVILLE.

 

« Un premier essai vient d’en être tenté dont la Confédération générale du Travail – laC.G.T- est satisfaite.

 

Des patrons, décrétés hors la loi comme suspects d’avoir manqué à la religion du syndicat ont vu leurs demeures incendiées et pillées, et n’ont dû leur salut qu’à la fuite. Les délégués des Bourses du travail s’en applaudissent. Ils ont voté hier cet ordre du jour qui solidarise leurs 500.000 adhérents avec les auteurs des désordres de FRESSENNEVILLE :

 

Les délégués à la conférence des fédérations, réunis à la C.G.T. au su des incidents de la grève des métallurgistes de FRESSENNEVILLE , constatent que l’exaspération qu’ont manifestée les grévistes a été la conséquence directe des provocations de patrons qui, 20 ans après la promulgation légale de la liberté syndicale, jette sur le pavé des camarades coupables d’être des militants et des syndicats.

 

Ils s’étonnent qu’on veuille les rendre responsables de leur acte de légitime colère qui n’est qu’une représaille d’exploités contre leurs exploiteurs ;

 

Et ils envoient à ces camarades leur salut de fraternelle sympathie et de solidarité.

 

Pouvait-il en être autrement ? Ces désordres n’étaient-ils pas organisés et prévus par ceux qui y applaudissent, et qui effrontément les donnent en exemple aux troupes fanatisées des syndicats rouges ?

 

Est-ce que, dès le mois de février dernier, le château n’était pas désigné aux porteurs de torches qui devaient l’enflammer ? Est-ce que le délégué de la métallurgie à la Bourse du Travail d’AMIENS, le citoyen MOREL, chargé d’organiser la grève dans le VIMEU, encore qu’il n’ait de sa vie, donné un coup de lime, - ne signait pas, le 1er février dernier, le bulletin de victoire des grèves de BETHENCOURT, précurseur des incendies de FRESSENNEVILLE : ce patron vient d’être vaincu. La veille de la grève, ce monsieur avait cru bon de se dérober à son personnel en partant immédiatement avec sa famille à ABBEVILLE. Mal lui en prit, les ouvriers ne trouvant à qui causer ne purent s’en prendre qu’à son usine et à son domicile particulier. Tout fut dévasté. »

 

 

 

 

 

NUMERO DU 12 AVRIL 1906

 

 

LA GREVE DE FRESSENNEVILLE : Dix Neuf arrestations. Les inculpés écroués à la Prison D’ABBEVILLE

 

Au moment où l’on commençait à désespérer de voir la justice poursuivre les coupables avec énergie, un véritable coup de théâtre s’est produit.

 

Ce n’est pas sans surprise qu’on appris à ABBEVILLE, hier, vers onze heures, que de nombreuses arrestations venaient d’être opérées.

La nouvelle était cependant vraie et déjà des individus arrêtés et amenés par le train de 10h 45 étaient écroués à la maison d’arrêt.

 

Au saut du lit

 

 

M. STEMLER, procureur de la République, avait fait appréhender le matin même, entre 5 et 6 heures, quatorze émeutiers contre lesquels un mandat avait été décerné.

Les inculpés se laissèrent arrêter sans opposer aucune résistance.

Les gendarmes les conduisirent aussitôt à la mairie où ils furent maintenus sous la surveillance de deux pelotons de cavalerie qui maintenaient la foule à distance et empêchaient les manifestations possibles.

 

 

 

 

A ABBEVILLE

 

A la gare d’ABBEVILLE un service d’ordre avait été organisé par la police et la gendarmerie sous la direction de M. MAGNIEZ, capitaine de gendarmerie, GIRAUD, commissaire de police et ANQUIER, brigadier. M. BIGNON, maire d’ABBEVILLE était présent, ainsi que M. le substitut du procureur.

 

Comme la nouvelle avait été tenue rigoureusement secrète, il n’y avait pas de curieux et aucune manifestation ne s’est produite. Par la gare de la petite vitesse, à l’écart du public, les inculpés furent conduits jusqu’aux omnibus de louage réquisitionnés pour leur transport à la prison.

 

 

L’inculpation

 

Divers chefs d’accusation pèsent sur les inculpés. Ils seront poursuivis notamment pour incendie criminel, excitation au meurtre, propagande anarchiste, violences, menaces, bris de clôture, etc…

Parmi eux figurent quatre anarchistes militants bien connus dans la région.

 

 

Les noms des personnes arrêtées ont été volontairement occultés par le Webmestre afin de ne pas porter atteinte à la réputation de leurs familles.

 

 

Tous sont serruriers et habitent FRESSENNEVILLE, FRIVILLE-ESCARBOTIN, FEUQUIERES et BETHENCOURT.

 

 

NOUVELLES ARRESTATIONS

 

Dans l’après-midi de mercredi, plusieurs autres arrestations ont été opérées à FRESSENNEVILLE.

 

Ces mesures n’ont pas paru produire une grande impression sur les grévistes qui parcourent toujours les rues en chantant la « Carmagnole » ou d’autres refrains révolutionnaires avec des paroles nouvelles adaptées sur des airs connus

 

 

Ces paroles ne figurent pas dans l'article de l'ABBEVILLOIS, mais en voici le texte :

 

                                     Nous avons droit au Syndicat (bis)

                                     Les RIQUIER ne l'empêch'ront pas

                                     Et margré les commis

                                     DELARUE et COLAS Louis

                                     Nous déclarons la grève

 

 

                                     Ils ont chassé un ouvrier (bis)

                                     Nous voulons le réintégrer

                                     Et s'ils ne marchent pas

                                     Nous les mettrons au pas 

                                     Par l'action directe

 

 

 

 

 

 

 

                                       1906 DEFILE DRAPEAU.gif

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Ceux qui veulent reprendre le travail espèrent que la situation va être modifiée du fait des arrestations, puisque MM. RIQUIER ont déclaré qu’ils n’accepteraient d’entrer en pourparlers que si les coupables étaient découverts et punis.

 

On saura bientôt si les magistrats ont mis la main sur les vrais coupables ou si l’on ne verra pas ceux-ci relâchés, comme cela s’est toujours produit dans des cas analogues.

Les quatre derniers appréhendés sont arrivés à ABBEVILLE par le train de 6h1/2.

Sur le quai se trouvaient M. BIGNON, maire d’ABBEVILLE ,MM. STEMLER, procureur, ALARD, substitut, de FLORIVAL, président du Tribunal Civil.

Le transbordement des prévenus escortés par les gendarmes s’est fait sans aucune difficulté à la gare de la petite vitesse.

Deux à trois cents curieux se trouvaient dans la cour, mais la foule ne s’est livrée à aucune manifestation.

Les prisonniers ont été aussitôt écroués.

 

 

Encore un !

 

La dix-neuvième arrestation a été opérée ce matin, à FRESSENNEVILLE.

Le prévenu a été amené à ABBEVILLE par le train de 8h 06.

Son arrivée, pas plus que celle des autres, n’a été l’occasion de manifestations.

 

 

 

Après l’incendie et la dévastation

 

Par ordonnance de référendum mardi après-midi sur la demande de MM. RIQUIER, M. le Président du Tribunal civil d’ABBEVILLE a commis trois experts pour faire le constat et l’évaluation des dégâts causés à leurs propriétés mobilières et immobilières.

Ce sont MM. LEON, entrepreneur ; GENCE, architecte municipal à ABBEVILLE, DUCATEL ancien commissaire priseur, à AMIENS.

 

 

 

Une Protestation

 

Les inculpés sont à peine sous les verrous que déjà les meneurs expriment leur mécontentement.

Dès hier, le citoyen MOREL s’est empressé de télégraphier au ministre de la Justice pour protester contre les arrestations qui viennent d’être opérées et qu’il qualifie d’arbitraires.

Selon lui, plusieurs individus arrêtés ne sont coupables que du « DELIT D’OPINION »

 

 

 

 

 

Les anarchistes dans les grèves du VIMEU

 

 

 

D’un correspondant de la Chronique Picarde :

 

« J’étais à FRESSENNEVILLE le jour même de l’émeute de 19h1/2 à 2 h. On causait de la grève qui aurait lieu dans l’après midi comme d’une chose devant certainement arriver. Ce n’a donc pas été une explosion « spontanée » ainsi que le dit M. STEMLER, mais bien l’exécution d’un plan préparé de longue main. Il y a identité entre ce qui s’est passé à BETHENCOURT chez M. DEBEAURAIN et ce qui s’est passé à FRESSENNEVILLE. (voir notre article sur les évènements de BETHENCOURT en 1906)

On dit partout dans la région que le Syndicat du fer a décidé en janvier que chaque fois qu’il y aurait grève on « agirait » aussitôt.

 

Je suis convaincu que c’est vrai, et les faits le prouvent. Le groupe anarchiste de FRESSENNEVILLE est assez important. Ce sont des parents de O….., dit « cou tordu » qui a été condamné à AMIENS l’année dernière. En plus de cela, la propagande est faite par les marchands ambulants (de peaux de lapins etc ….), qui en réalité sont ou des contrebandiers ou des recéleurs, achetant des métaux volés un peu partout. La gendarmerie les connaît, mais elle est impuissante.

 

Tous ces gens-là sont protégés……. . Depuis un an, on a incendié l’usine HURTEL à TULLY, on a saccagé à BETHENCOURT, incendié et brisé à FRESSENNEVILLE, et il n’y a pas eu une seule condamnation pour tout cela. Les individus arrêtés et relâchés se moquent des gendarmes à leur passage. »

 

 

 


Date de création : 29/06/2007 @ 16:20
Dernière modification : 01/11/2017 @ 19:12
Catégorie :
Page lue 2062 fois

^ Haut ^